Une année Rafighi : Juillet
©Rahmat Rafighi
Passacaille de juillet
par Claude Seintignan
Juillet c’est aussi ce garçon sauvage
Qui marche sur la grève abandonné, au point du jour
En chemin il a grignoté trois fruits
Cueillis aux feuilles déjà roussissantes d’un abricotier
Délaissant les fenêtres où les gens dorment derrière le fantôme blanc des rideaux
Il s’est avancé sous le toit matinal des hirondelles auxs ailes effilées
Comme elles stridulent sur le dôme jaune et vert!
Cadencer sur leurs chants son pas aux enjambées larges et souples
La plage. Il traîne désormais pantalon retroussé dans l’écume
Ramassant au passage le baiser salé des coquillages
Que lui disputent avec une étonnante audace les jeunes goélands
Soudain, il découvre une femme nue qui se cache de lui dans la mer
Séraphin aquatique la tête et les longs cheveux seuls flottent sur la vague
Elle chante une passacaille oubliée qui fait pleurer les rochers et les arbres
Il pense“pluie du matin fait le bonheur du pèlerin”
Et range courtoisement ses vêtements et sa serviette à l’abri d’une barcasse renversée
Il s’éloigne enfin sur le sentier escarpé de la dune bordière
La tête de la femme cachée dans l’eau l’interpelle
— “Tu sais qui je suis?” Il rougit jusqu’aux racines des cheveux. — “Oui je sais. Tu es l’été.”
Et fuit, pétri de honte, en dissimulant sa course dans les hautes touffes d’oyat
Le mois de juillet c’est exactement un autoportait du peintre
Il est debout souriant sous les feuillages, le buste légèrement rejeté en arrière face à son chevalet
Un rayon lumineux perçant la ramure éclaire seulement ses mains et ses pinceaux
L’éclairage nous dit — « Ces mains et ces pinceaux sont vos yeux ! »
Exactement le mois de juillet !
Passacaille : Genre musical à trois temps. Avant d'être une danse la passacaille fut d'abord un chant de marin. Arrivés au port, les marins échangeaient leur chant d'où le nom de passacaille.
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